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- Par jpdarky, zottel
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L'article d'athor l'a démontré, l'éventualité de la disparition de notre Racing existe. Il faut s'y préparer. Nous ne sommes pas seuls dans notre désespoir. Nos enquêteurs ont mis la main sur un document confidentiel de la FFF. C'est du lourd.
La fin de la saison approche et désormais même une montée semble ne pas pouvoir éviter l'incroyable : la liquidation de notre club, le Racing Choucroute Saucisse. Certains se voilent la face et croient à l'arrivée d'un Chevalier Blanc [et inconscient]. D'autres sont prêts à un pacte faustien avec la racaille en col blanc et chaîne en or qui a, sans le vouloir, fait éclater à la face d'une jeunesse éprise de Justice et d'idéal humaniste l'hideuse réalité du football professionnel français et sa sarabande infernale de mesquines manoeuvres et de putrides arrangements en 1993. Il faut cependant aussi envisager le scénario le plus noir, donc, la disparition corps et biens du club phare de l'approche dada-punk du football [1].
Mais nous ne sommes pas seuls, nos investigateurs ont pu se procurer un document confidentiel de la FFF qui décrit précisément la mise en place et les opérations d'une cellule de soutien psychologique qui sera déployée immédiatement après l'annonce éventuelle, mais tout de même fort probable, de la liquidation de notre club.
Il faut savoir que la FFF a tiré les leçons du drame de Nasknia truc machin de l'éte dernier. Ils ont décidé de ne plus négliger l'aspect psychologique, psychanalytique et Klasnic dans les cas de détresse aiguë. La Fédé a un plan simple : proposer des solutions de repli pour nous les supporters du RCS, qui n'auront bientôt plus d'objet pour notre obsession. La disparition de l'objet de notre névrose doit en toute logique nous faire tous tomber dans une perversion. Qui deviendra accro aux chaussettes en lycra usagées, qui à la crème Mont-Blanc (dans l'oreille), qui aux rugbymen androgynes, etc.
Un protocole très pointu a été développé en collaboration avec les meilleurs conseillers-d'orientation-psychologues de l'Université Carnegie-Mellon. Ce protocole de la FFF donne, d'une part, les clés de lecture aux souteneurs psychologiques pour identifier les profils de supporters, et, dans un deuxième temps, suggère un panel restreint de club de repli ou d'activités de substitution pour chaque profil. Voici les schémas proposés.
Il s'agit du supporter égaré au Racing grosso-modo en raison des retombées des drames de 1998 et/ou 2000, les deux premiers cavaliers de l'apocalypse [2] de notre foot français depuis moribond car vendu aux misérables épiciers sans cervelle de la marchandisation et de la part de marché.
C'est un cas simple, ce sujet vit dans la douleur de subir le jeu du RCS depuis trop de saisons. Il était là pour les olas, les bâtons gonflables qui font paf-paf quand on les tape, les maillots multicolores à changer chaque saison, Gloria Gaynor et les grands moments de fausse union généralisée où il veut pouvoir embrasser son épicier arabe en hurlant « on est champions » le samedi soir parce qu'on est tous frères tout en le dénonçant à la police municipale le lendemain dimanche parce que l'épicier ouvre son échoppe et que ça fait du bruit sous ses fenêtres, et que quand même bon, les pois chiches et les merguez ça sent fort. La fin de vie du Racing est en réalité une libération pour ce patient, il ne le sait simplement pas.
SOLUTION : Proposer un club à la pérennité médiatique et merchanidisiaque à long terme, en misant sur les clubs les plus cités à TéléFoot pour le commun, à Canal Football Club pour les cas qui se croient sophistiqués, et chez Saccomano pour les aveugles. L'avantage patient est évident. Le vrai bon opium enfin trouvé, le sujet retrouvera calme, sérénité et arrêtera de taper sa femme. De plus, il ne passera plus pour un taré dans les mariages et banquets durant le moment pénible où un cousin breton vient mettre le sujet du foot sur la table. Il n'y a aucun inconvénient pour ce type de patient. Pour sa femme, en revanche, vu qu'elle a épousé un type pareil, elle doit être du même calibre, et elle risque de croire qu'elle s'intéresse au football. Navrantes considérations sur le PSG qui est trop drôle et autres niaiseries entendues vaguement à la radio et ressassées jusqu'à la nausée en perspective. Bref, pour la conjointe, c'est la chute morale, éthique et spirituelle. Mais en fait on s'en fout, dans le cas d'espèce, c'est le patient que l'on cherche a soutenir psychologiquement, pas sa femme.
Le roots va au Racing pour les valeurs qu'il véhicule : punkitude, magie et désinvolture. Il n'est pas rare que ce patient ne s'intéresse même pas au football en tant que tel [on le comprend], mais c'est l'ensemble, le rituel social de l'avant-stade, écouter les vieux raconter les mêmes blagues et anecdotes en alsacien, rêver à la vraie bière et aux currywurst du Joggeli en mâchonnant des saucisses infâmes et sirotant du Seven Up frelaté, espérer une baston sur ou à côté du terrain, parce qu'on se marrait bien dans le foot français dans les 80's quand même, etc.
SOLUTION : Proposer un club capable de proposer un feu d'artifice d'événements et activités au delà du football et véhiculant des valeurs similaires à défaut d'identiques à celles du RCS.
Il a décidé d'enfourcher le cheval de la contradiction, et plus rien ne l'arrête. Un vrai sacerdoce.
On lui parle de déclin, lui voit le bout du tunnel. Mais au moment où l'on reprend espoir, il joue la lyre du fatalisme. Si l'on se fâche, il n'a pas le temps de répondre. Condamné enfin à boire un verre de cigüe, il remarquera qu'il est « à moitié plein », ce qu'il prendra comme un heureux présage.
En réalité, sa solitude, c'est celle qu'on savoure, c'est celle des puissants. Il ne veut pas simplement flatter les bas instincts des supporters; les copains ont besoin de ses humeurs, ses croisades, sa mâle assurance, ses trahisons. Voter contre quelque chose, c'est toujours un peu voter pour lui, car l'alternative, c'est lui.
SOLUTION : Peu importe le sport où il s'épanouit ; le Supporter Nuancé, chef dans l'âme, a simplement besoin d'une troupe (et réciproquement). Maintenant qu'il est orphelin du Racing, il doit donc être entouré, moyennant quoi sa guérison est hors de doute. Pourront se relayer à son chevet différentes équipes susceptibles d'être dirigées d'une main ferme.
Il dîne en ville avec un Keller, connaît personnellement le recruteur d'un club de 4. Bundesliga, et aussi, assez bien, certaines « sources proches du club ». Wattwiller, Carola ? Le point n'est pas éclairci, mais il s'y abreuve manifestement avec prudence et parcimonie. Il faut dire encore qu'il a beaucoup lu, davantage que tout le monde. Bref, s'il fait mine de radoter comme Christian Daniel, c'est pour tromper l'ennemi; il en sait long, c'est sûr.
Il faut reconnaître que tout lui parle, tout fait sens à ses yeux perçants. Hammerson et Carousel sont basées à Londres. C'est un fait. Or le meilleur cheval du haras de Jacky Duguépéroux s'appelle Prince, comme le mari de Kate Middleton ! Tiens, tiens ! Et puis pourquoi Prince a ri ? De plus, Jafar Hilali a-t-il jamais dit de mal du régime de Kadhafi ? Cela suggèrerait qu'il le soutient tacitement ! Hum, hum ! Plus troublant encore, la répétition du « t » dans les noms de Trautmann et Ginestet. Elle ne peut être fortuite. En tout cas, le doute demeurera tant qu'on n'aura pas prouvé le contraire. Et qu'on ne nous parle plus des voyelles, c'est un leurre risible !
SOLUTION : La survie de Racing n'aurait fait que prolonger l'ambiguïté, car sa disparition est, « c'est limpide », un élément du Grand Plan. Plus fort encore, les hésitations de la Main Cachée prouvent indirectement qu'elle existe, car sinon elle n'hésiterait pas. Une Main non-existante non-hésiterait. CQFD. Familier de ces sombres évidences, le supporter-qui-n'est-pas-dupe saura se remettre. Il lui reste encore à explorer :
Il parle très mal la langue, à sa grande honte. Il tente régulièrement de se le faire pardonner en récitant à haute voix les meilleurs passages de wikipedia, section « Alsace ».
Le déclin de la culture alsacienne - continu depuis le Paléolithique - le désole au dernier degré. Il tente inlassablement d'en extraire la substance fondamentale, comme pour mieux la conserver : « Strasbourg préfère la France », « Strasbourg préfère l'Allemagne », « L'Alsacien est un bon vivant ; il aime l'humour rigolo - à condition que ce soit de bon goût ! », etc. Un savant décrivant une nouvelle sorte d'insecte ne s'y prendrait pas autrement.
Mais l'Alsacien d'adoption ne trompe en réalité personne. Ses handicaps génétiques, culturels, syntaxiques lui interdisent à jamais une parfaite fusion avec sa région d'accueil. Il le sent bien lui-même. C'est tellement difficile de devenir étranger ! Bref, il souffre.
Est-il con ? Il est seul, peut-être, mais c'est un sage. En effet, il est ouvert d'esprit dans les moments où l'Alsacien moyen est obtus. Inversement, il est lucide quand l'Alsacien banal est crédule. De plus, s'il aime Gress, lui aussi, c'est à mesure de son génie, ni plus ni moins. Il n'entretient pas la moindre illusion à son sujet, contrairement aux rêveurs. Ce qui n'en fait pas un bobo ! Même si, bien sûr, Fessenheim lui fait un peu peur. En somme, il a toujours raison, alors que les Alsaciens ordinaires sont toujours légèrement décevants, qui trop ceci, qui pas assez cela... Et si l'Alsacien idéal, finalement, c'était l'Adopté ? L'idée doit le taquiner.
Pour ce qui est du football, les clubs moribonds comme les cultures déclinantes font vibrer son âme de résistant multicarte. Et au-delà même, il est probable que les Indiens d'Amérique l'attirent sexuellement.
SOLUTION : Pour lui, il n'existe pas de traitement curatif. Facteur étiologique parmi d'autres, la chute du Racing affecte à peine son état - d'ailleurs, il l'avait prédite de longue date. Mais les crises peuvent être atténuées ; pour cela, prendre des cours d'alsacien à l'ALEP, composer en oum-papa une ode au défunt club-phare, se concentrer sur des substituts affectifs :
Pour lui, les Allemandes de l'Est n'étaient pas dopées, juste plus vigoureuses que la moyenne. Les contradictions de l'universalisme français et des tréfonds inégalitaires du Vaterland ne l'émeuvent pas, puisqu'il préfère Schumacher. Il aime bien aussi le Titisee, le pouvoir d'achat confortable, les grosses voitures, Derrick. Il porte la mulette. Il n'aime pas trop les Gipsy Kings, la compagnie créole, Yvan Colonna.
Dans ces conditions, il lui est pénible d'être né français. A ses yeux, le Racing est une petite vengeance. De quoi, au reste ? Il n'est même pas sûr que l'Allemagne ait jamais perdu quoi que ce soit, et le dopage n'a rien à voir là-dedans : le grand air, la charcuterie, rien de plus.
Racingman convaincu, il ne rêve que de joueurs allemands à la Meinau, taillés dans de la teutonite brute, comme Carsten Jancker. Ah, il aimerait tant entendre à nouveau tonner le courroux de Thor et Odin ! Et trembler le continent ! A la rigueur, un but de Mamadou Niang peut lui suffire. A condition que ce soit sous le bon maillot.
SOLUTION : Le Racing disparu, son état est grave. Le bougre relirait à profit Joachim du Bellay :
Plus mon Loire Gaulois que le Tibre Latin, plus mon petit Liré que le mont Palatin, et plus que l'air marin la douceur angevine
Alternativement, il lui reste l'exil. Recommandons-lui aussi :
Le retour de Tambow de son aïeul, il y a 50 ans, le lie à jamais à la France.
Enfant, j'ai pleuré aux malheurs de la France à Waterloo ou à Sedan. Aucun autre drapeau que le tricolore, aucun autre hymne que la Marseillaise ne mouillera jamais mes yeux...
...disait Raymon Aron. Et bien, c'est encore un peu tiède pour lui.
Lui ne rate jamais un 14 juillet télévisé, corrige les « si j'aurais » ridicules de son voisin plus modestement instruit. S'il connaît un peu d'alsacien, il ne s'en sert que pour orienter vers la déchetterie les touristes allemands cherchant le Haut-Koenigsbourg.
Il pense d'ailleurs que le Le Professeur Knatschke a vraiment existé, et que la cathédrale de Strasbourg a perdu un clocher lors de l'invasion des Ostrogoths d'Alaric. Dominique de Villepin le trouble, il se cache pour écouter Rihanna - et inversement.
SOLUTION : Le Racing n'était pour lui qu'un alibi pour suivre le championnat de France. Il s'y intéressait à peine depuis ce jour où Oscar Heisserer était capitaine du Onze tricolore. Son état est grave, le bougre relirait à profit les Bredelers. Alternativement, il lui reste l'exil. Si la situation n'évolue pas, il doublera, si la chose est encore possible, et sous contrôle médical strict, les doses de :
On l'a traité de collabo, mais c'est très exagéré. Il est moins vif que les contrôleurs de Fukushima. C'est un Bouddha ! En marbre ! Il n'est même pas sûr qu'il ait jamais eu tort, puisqu'il n'a jamais émis la moindre idée.
Pour lui, les solutions n'en sont pas. Il préfère attendre que la lumière se fasse d'elle-même. Sans hâte ; dans la caverne de Platon, c'est le gars qui porte des lunettes de soleil. En attendant, sa résignation a les apparences d'un bon sens rural qu'il semble placer au dessus de tout - elle est pourtant sous-tendue par une foi émouvante aux accents millénaristes, car dans wait & see, il y a « see » ;
En ce jour-là, les sourds entendront les paroles du livre; et, délivrés de l'obscurité et des ténèbres, les yeux des aveugles verront (Esaïe 29:18)
SOLUTION : L'homme ignore les détails de l'actualité du Racing, qui ont bien peu de prise sur sa philosophie immortelle. Mais si un consensus quelconque se dégage parmi les supporters, lui, à l'affût, demandera d'attendre encore, et encore, et encore, et encore [c'est que le début, d'accord, d'accord].
Son état est éminemment stationnaire, jusqu'à l'absurde. Tout va donc bien pour lui, mais s'il s'ennuie un peu, il pourra employer ses talents naturels :
On ne parle pas du R.U. situé au dessus du Minotaure, non, il s'agit ici du supporter qui ne s'intéresse en réalité qu'à la victoire. Celui qui parle fort à la machine à café le lundi matin quand son club [en réalité le club qu'il s'est choisi pour vivre des moments de gloire au travers de victoires auxquelles il ne participe évidemment en rien, comme nous tous] a remporté un match. Lui qui a passé toutes les vacances 1998 et 2000 à hurler « champiooons ! »aux oreilles de guides thaïlandais ou de taxis tunisiens qui n'en avaient rien à secouer. Mais lui avait l'impression d'avoir gagné. Ce genre de personnage vit souvent sa passion au travers simplement du live de lequipe.fr, un 1-0 lui va tout à fait, il s'en fout, il ne regarde pas de toute façon. Il vous jure avoir supporté l'OM dès la D2 le samedi soir, et le jeudi matin qui suit il vous parle de sa mère barcelonaise.
D'ailleurs, si un autre sport médiatique apportait son lot de victoires, cela lui irait très bien, le foot c'est juste parce que ça passe souvent. Mais si le twirling bâton passait en prime time et que Vesoul était champion d'Europe, il serait vésulien de coeur depuis sa naissance et il adorerait virevolter de la branche.
Il est difficile de croire qu'il existe encore ce genre d'individus dans ce qui reste du supportariat strasbourgeois vu la disette de victoire et de paillettes ces dernières années. Mais si c'est le cas, ce genre de type ne mérite que le mépris, nous ne sommes pas la LFP, nous n'avons pas besoin de clients, de PdM, etc.
SOLUTION : Ce genre de triste sire n'est que trop présent de nos jours en France aux alentours du football. Proposons lui donc les zones sinistrées moralement du football français, où il pourra se complaire en compagnie d'autres girouettes :
This is the end / Beautiful friend / This is the end / My only friend, the end / Of our elaborate plans, the end / Of everything that stands, the end
Refermons ce document, et lamentons nous mes frères. La fin est proche, et une question n'a pas trouvé de réponse malgré ce document à la fois exclusif et salvateur : que deviendra le Stub ? Pour beaucoup d'entre nous, finalement, le Stub est souvent plus intéressant que le RCS des Hilali ou Ginestet. Imaginons le Stub continuer après la disparition du très Grand Racing Choucroute Saucisse... On s'inventerait des journées de championnat irréel dans HatTrick, des compos hallucinées, les gars stammtischeraient comme des fous à coups de liens youtube du but de Keshi en boucle à l'infini...
Certains le murmurent : finalement on s'en fout de sauver le club, refiler du pognon à machin pour qu'il s'achète un vélo elliptique plaqué or afin de perdre sa brioche en tapotant sur son blackberry des ordres de marché qui pourrissent son âme déjà rendue quasi inexistante par l'acculturation et la perte de toutes référence et repères qui font des gens des êtres humains membres d'une société ? Plutôt crever, non, ce qu'il faut sauver, c'est le Stub.
En vous remerciant.
Article co-écrit avec zottel.
[1] Le RCS c'est encore aujourd'hui le football total version Concerto pour détraqués : du spectacle sur le terrain [parfois le spectacle est offert par l'adversaire, mais bon] et du spectacle en dehors des terrains, au siège social, au tribunal, à Londres, sur RMC, etc. Source : Le Quotidien du Médecin
[2] Les deux derniers étant Pierre Ménes et Claude Leroidec. Source : Thèse d'Etat de M. Platini, soutenue à la Sorbonne en avril 2002 :« A jamais devant Zidane, non mais ho ».
Bonjour, connais-tu ce livre ?
Mais nous ne sommes pas seuls, nos investigateurs ont pu se procurer un document confidentiel de la FFF qui décrit précisément la mise en place et les opérations d'une cellule de soutien psychologique qui sera déployée immédiatement après l'annonce éventuelle, mais tout de même fort probable, de la liquidation de notre club.
Il faut savoir que la FFF a tiré les leçons du drame de Nasknia truc machin de l'éte dernier. Ils ont décidé de ne plus négliger l'aspect psychologique, psychanalytique et Klasnic dans les cas de détresse aiguë. La Fédé a un plan simple : proposer des solutions de repli pour nous les supporters du RCS, qui n'auront bientôt plus d'objet pour notre obsession. La disparition de l'objet de notre névrose doit en toute logique nous faire tous tomber dans une perversion. Qui deviendra accro aux chaussettes en lycra usagées, qui à la crème Mont-Blanc (dans l'oreille), qui aux rugbymen androgynes, etc.
Un protocole très pointu a été développé en collaboration avec les meilleurs conseillers-d'orientation-psychologues de l'Université Carnegie-Mellon. Ce protocole de la FFF donne, d'une part, les clés de lecture aux souteneurs psychologiques pour identifier les profils de supporters, et, dans un deuxième temps, suggère un panel restreint de club de repli ou d'activités de substitution pour chaque profil. Voici les schémas proposés.
Le « footix »
Il s'agit du supporter égaré au Racing grosso-modo en raison des retombées des drames de 1998 et/ou 2000, les deux premiers cavaliers de l'apocalypse [2] de notre foot français depuis moribond car vendu aux misérables épiciers sans cervelle de la marchandisation et de la part de marché.
C'est un cas simple, ce sujet vit dans la douleur de subir le jeu du RCS depuis trop de saisons. Il était là pour les olas, les bâtons gonflables qui font paf-paf quand on les tape, les maillots multicolores à changer chaque saison, Gloria Gaynor et les grands moments de fausse union généralisée où il veut pouvoir embrasser son épicier arabe en hurlant « on est champions » le samedi soir parce qu'on est tous frères tout en le dénonçant à la police municipale le lendemain dimanche parce que l'épicier ouvre son échoppe et que ça fait du bruit sous ses fenêtres, et que quand même bon, les pois chiches et les merguez ça sent fort. La fin de vie du Racing est en réalité une libération pour ce patient, il ne le sait simplement pas.
SOLUTION : Proposer un club à la pérennité médiatique et merchanidisiaque à long terme, en misant sur les clubs les plus cités à TéléFoot pour le commun, à Canal Football Club pour les cas qui se croient sophistiqués, et chez Saccomano pour les aveugles. L'avantage patient est évident. Le vrai bon opium enfin trouvé, le sujet retrouvera calme, sérénité et arrêtera de taper sa femme. De plus, il ne passera plus pour un taré dans les mariages et banquets durant le moment pénible où un cousin breton vient mettre le sujet du foot sur la table. Il n'y a aucun inconvénient pour ce type de patient. Pour sa femme, en revanche, vu qu'elle a épousé un type pareil, elle doit être du même calibre, et elle risque de croire qu'elle s'intéresse au football. Navrantes considérations sur le PSG qui est trop drôle et autres niaiseries entendues vaguement à la radio et ressassées jusqu'à la nausée en perspective. Bref, pour la conjointe, c'est la chute morale, éthique et spirituelle. Mais en fait on s'en fout, dans le cas d'espèce, c'est le patient que l'on cherche a soutenir psychologiquement, pas sa femme.
- Barcelone ou Real Madrid
- AC Milan ou Juventus
- OL ou ETG
Le supporter « roots »
Le roots va au Racing pour les valeurs qu'il véhicule : punkitude, magie et désinvolture. Il n'est pas rare que ce patient ne s'intéresse même pas au football en tant que tel [on le comprend], mais c'est l'ensemble, le rituel social de l'avant-stade, écouter les vieux raconter les mêmes blagues et anecdotes en alsacien, rêver à la vraie bière et aux currywurst du Joggeli en mâchonnant des saucisses infâmes et sirotant du Seven Up frelaté, espérer une baston sur ou à côté du terrain, parce qu'on se marrait bien dans le foot français dans les 80's quand même, etc.
SOLUTION : Proposer un club capable de proposer un feu d'artifice d'événements et activités au delà du football et véhiculant des valeurs similaires à défaut d'identiques à celles du RCS.
- PSG
- SCBastia
- Faith No More
Le supporter nuancé
Il a décidé d'enfourcher le cheval de la contradiction, et plus rien ne l'arrête. Un vrai sacerdoce.
On lui parle de déclin, lui voit le bout du tunnel. Mais au moment où l'on reprend espoir, il joue la lyre du fatalisme. Si l'on se fâche, il n'a pas le temps de répondre. Condamné enfin à boire un verre de cigüe, il remarquera qu'il est « à moitié plein », ce qu'il prendra comme un heureux présage.
En réalité, sa solitude, c'est celle qu'on savoure, c'est celle des puissants. Il ne veut pas simplement flatter les bas instincts des supporters; les copains ont besoin de ses humeurs, ses croisades, sa mâle assurance, ses trahisons. Voter contre quelque chose, c'est toujours un peu voter pour lui, car l'alternative, c'est lui.
SOLUTION : Peu importe le sport où il s'épanouit ; le Supporter Nuancé, chef dans l'âme, a simplement besoin d'une troupe (et réciproquement). Maintenant qu'il est orphelin du Racing, il doit donc être entouré, moyennant quoi sa guérison est hors de doute. Pourront se relayer à son chevet différentes équipes susceptibles d'être dirigées d'une main ferme.
- Le club de foot du village
- Les pompiers municipaux
- Le conseil municipal
- Une famille douce et aimante
- Ses amis et collaborateurs de Carousel Finances
Le supporter qui n'est pas dupe
Il dîne en ville avec un Keller, connaît personnellement le recruteur d'un club de 4. Bundesliga, et aussi, assez bien, certaines « sources proches du club ». Wattwiller, Carola ? Le point n'est pas éclairci, mais il s'y abreuve manifestement avec prudence et parcimonie. Il faut dire encore qu'il a beaucoup lu, davantage que tout le monde. Bref, s'il fait mine de radoter comme Christian Daniel, c'est pour tromper l'ennemi; il en sait long, c'est sûr.
Il faut reconnaître que tout lui parle, tout fait sens à ses yeux perçants. Hammerson et Carousel sont basées à Londres. C'est un fait. Or le meilleur cheval du haras de Jacky Duguépéroux s'appelle Prince, comme le mari de Kate Middleton ! Tiens, tiens ! Et puis pourquoi Prince a ri ? De plus, Jafar Hilali a-t-il jamais dit de mal du régime de Kadhafi ? Cela suggèrerait qu'il le soutient tacitement ! Hum, hum ! Plus troublant encore, la répétition du « t » dans les noms de Trautmann et Ginestet. Elle ne peut être fortuite. En tout cas, le doute demeurera tant qu'on n'aura pas prouvé le contraire. Et qu'on ne nous parle plus des voyelles, c'est un leurre risible !
SOLUTION : La survie de Racing n'aurait fait que prolonger l'ambiguïté, car sa disparition est, « c'est limpide », un élément du Grand Plan. Plus fort encore, les hésitations de la Main Cachée prouvent indirectement qu'elle existe, car sinon elle n'hésiterait pas. Une Main non-existante non-hésiterait. CQFD. Familier de ces sombres évidences, le supporter-qui-n'est-pas-dupe saura se remettre. Il lui reste encore à explorer :
- Les coulisses de l'OM et ses accointances avec Ndrangheta
- Les coulisses de Boulogne-sur-Mer et les réseaux belges
- Les coulisses de Luzenac, le scandale du talc cancérigène, l'Europe des lobbies, le projet réel de Schuman et Adenauer; à terme, songer aux liens entre Luzenac, le talc, et l'introduction du paradigme libéral dans le monde judéo-chrétien consécutivement aux développements de la méthode expérimentale
- Les pronostics du championnat 2012 d'après le calendrier maya
- Les liens occultes entre Thierry Roland et le Stade de Reims
- Le complot international ayant empêché Pirès de revenir en EdF, forcément un complot
- La main d'Henry; les signes annonciateurs dans les oeuvres de Polanski, Kubrick, et dans Matrix II
L'Alsacien d'adoption
Il parle très mal la langue, à sa grande honte. Il tente régulièrement de se le faire pardonner en récitant à haute voix les meilleurs passages de wikipedia, section « Alsace ».
Le déclin de la culture alsacienne - continu depuis le Paléolithique - le désole au dernier degré. Il tente inlassablement d'en extraire la substance fondamentale, comme pour mieux la conserver : « Strasbourg préfère la France », « Strasbourg préfère l'Allemagne », « L'Alsacien est un bon vivant ; il aime l'humour rigolo - à condition que ce soit de bon goût ! », etc. Un savant décrivant une nouvelle sorte d'insecte ne s'y prendrait pas autrement.
Mais l'Alsacien d'adoption ne trompe en réalité personne. Ses handicaps génétiques, culturels, syntaxiques lui interdisent à jamais une parfaite fusion avec sa région d'accueil. Il le sent bien lui-même. C'est tellement difficile de devenir étranger ! Bref, il souffre.
Est-il con ? Il est seul, peut-être, mais c'est un sage. En effet, il est ouvert d'esprit dans les moments où l'Alsacien moyen est obtus. Inversement, il est lucide quand l'Alsacien banal est crédule. De plus, s'il aime Gress, lui aussi, c'est à mesure de son génie, ni plus ni moins. Il n'entretient pas la moindre illusion à son sujet, contrairement aux rêveurs. Ce qui n'en fait pas un bobo ! Même si, bien sûr, Fessenheim lui fait un peu peur. En somme, il a toujours raison, alors que les Alsaciens ordinaires sont toujours légèrement décevants, qui trop ceci, qui pas assez cela... Et si l'Alsacien idéal, finalement, c'était l'Adopté ? L'idée doit le taquiner.
Pour ce qui est du football, les clubs moribonds comme les cultures déclinantes font vibrer son âme de résistant multicarte. Et au-delà même, il est probable que les Indiens d'Amérique l'attirent sexuellement.
SOLUTION : Pour lui, il n'existe pas de traitement curatif. Facteur étiologique parmi d'autres, la chute du Racing affecte à peine son état - d'ailleurs, il l'avait prédite de longue date. Mais les crises peuvent être atténuées ; pour cela, prendre des cours d'alsacien à l'ALEP, composer en oum-papa une ode au défunt club-phare, se concentrer sur des substituts affectifs :
- Le FC Mulhouse
- Le FC Gueugnon
- Le FC Castroville
- Le FC Riquewihr
- Le FC Ecomusée
Le supporter de la frontière allemande
Pour lui, les Allemandes de l'Est n'étaient pas dopées, juste plus vigoureuses que la moyenne. Les contradictions de l'universalisme français et des tréfonds inégalitaires du Vaterland ne l'émeuvent pas, puisqu'il préfère Schumacher. Il aime bien aussi le Titisee, le pouvoir d'achat confortable, les grosses voitures, Derrick. Il porte la mulette. Il n'aime pas trop les Gipsy Kings, la compagnie créole, Yvan Colonna.
Dans ces conditions, il lui est pénible d'être né français. A ses yeux, le Racing est une petite vengeance. De quoi, au reste ? Il n'est même pas sûr que l'Allemagne ait jamais perdu quoi que ce soit, et le dopage n'a rien à voir là-dedans : le grand air, la charcuterie, rien de plus.
Racingman convaincu, il ne rêve que de joueurs allemands à la Meinau, taillés dans de la teutonite brute, comme Carsten Jancker. Ah, il aimerait tant entendre à nouveau tonner le courroux de Thor et Odin ! Et trembler le continent ! A la rigueur, un but de Mamadou Niang peut lui suffire. A condition que ce soit sous le bon maillot.
SOLUTION : Le Racing disparu, son état est grave. Le bougre relirait à profit Joachim du Bellay :
Plus mon Loire Gaulois que le Tibre Latin, plus mon petit Liré que le mont Palatin, et plus que l'air marin la douceur angevine
Alternativement, il lui reste l'exil. Recommandons-lui aussi :
- La Nationalmannschaft
- Le Bayern Münich
- Le FC Frankonia
- Le club corpo de ELTERN
- Une équipe avec Lothar Matthäus dedans
- La Légion étrangère
L'Alsacien francophile
Le retour de Tambow de son aïeul, il y a 50 ans, le lie à jamais à la France.
Enfant, j'ai pleuré aux malheurs de la France à Waterloo ou à Sedan. Aucun autre drapeau que le tricolore, aucun autre hymne que la Marseillaise ne mouillera jamais mes yeux...
...disait Raymon Aron. Et bien, c'est encore un peu tiède pour lui.
Lui ne rate jamais un 14 juillet télévisé, corrige les « si j'aurais » ridicules de son voisin plus modestement instruit. S'il connaît un peu d'alsacien, il ne s'en sert que pour orienter vers la déchetterie les touristes allemands cherchant le Haut-Koenigsbourg.
Il pense d'ailleurs que le Le Professeur Knatschke a vraiment existé, et que la cathédrale de Strasbourg a perdu un clocher lors de l'invasion des Ostrogoths d'Alaric. Dominique de Villepin le trouble, il se cache pour écouter Rihanna - et inversement.
SOLUTION : Le Racing n'était pour lui qu'un alibi pour suivre le championnat de France. Il s'y intéressait à peine depuis ce jour où Oscar Heisserer était capitaine du Onze tricolore. Son état est grave, le bougre relirait à profit les Bredelers. Alternativement, il lui reste l'exil. Si la situation n'évolue pas, il doublera, si la chose est encore possible, et sous contrôle médical strict, les doses de :
- OM, OL, Bordaube
- L'Equipe et les Cahiers du Football
- Christophe Barbier et son Grand Club de Paris
- Parlons des autres Bleus
- France 98
Le supporter qui reste réservé
On l'a traité de collabo, mais c'est très exagéré. Il est moins vif que les contrôleurs de Fukushima. C'est un Bouddha ! En marbre ! Il n'est même pas sûr qu'il ait jamais eu tort, puisqu'il n'a jamais émis la moindre idée.
Pour lui, les solutions n'en sont pas. Il préfère attendre que la lumière se fasse d'elle-même. Sans hâte ; dans la caverne de Platon, c'est le gars qui porte des lunettes de soleil. En attendant, sa résignation a les apparences d'un bon sens rural qu'il semble placer au dessus de tout - elle est pourtant sous-tendue par une foi émouvante aux accents millénaristes, car dans wait & see, il y a « see » ;
En ce jour-là, les sourds entendront les paroles du livre; et, délivrés de l'obscurité et des ténèbres, les yeux des aveugles verront (Esaïe 29:18)
SOLUTION : L'homme ignore les détails de l'actualité du Racing, qui ont bien peu de prise sur sa philosophie immortelle. Mais si un consensus quelconque se dégage parmi les supporters, lui, à l'affût, demandera d'attendre encore, et encore, et encore, et encore [c'est que le début, d'accord, d'accord].
Son état est éminemment stationnaire, jusqu'à l'absurde. Tout va donc bien pour lui, mais s'il s'ennuie un peu, il pourra employer ses talents naturels :
- A croire en une victoire de la Selecção portugaise, surtout si elle est favorite
- Ou alors, choisir n'importe quelle équipe de Jean-Marc Furlan
- A parler de l'« arbitrage vidéo »
- A construire un nouveau stade à Strasbourg
- A marcher jusqu'à l'horizon
La girouette de la Victoire
On ne parle pas du R.U. situé au dessus du Minotaure, non, il s'agit ici du supporter qui ne s'intéresse en réalité qu'à la victoire. Celui qui parle fort à la machine à café le lundi matin quand son club [en réalité le club qu'il s'est choisi pour vivre des moments de gloire au travers de victoires auxquelles il ne participe évidemment en rien, comme nous tous] a remporté un match. Lui qui a passé toutes les vacances 1998 et 2000 à hurler « champiooons ! »aux oreilles de guides thaïlandais ou de taxis tunisiens qui n'en avaient rien à secouer. Mais lui avait l'impression d'avoir gagné. Ce genre de personnage vit souvent sa passion au travers simplement du live de lequipe.fr, un 1-0 lui va tout à fait, il s'en fout, il ne regarde pas de toute façon. Il vous jure avoir supporté l'OM dès la D2 le samedi soir, et le jeudi matin qui suit il vous parle de sa mère barcelonaise.
D'ailleurs, si un autre sport médiatique apportait son lot de victoires, cela lui irait très bien, le foot c'est juste parce que ça passe souvent. Mais si le twirling bâton passait en prime time et que Vesoul était champion d'Europe, il serait vésulien de coeur depuis sa naissance et il adorerait virevolter de la branche.
Il est difficile de croire qu'il existe encore ce genre d'individus dans ce qui reste du supportariat strasbourgeois vu la disette de victoire et de paillettes ces dernières années. Mais si c'est le cas, ce genre de type ne mérite que le mépris, nous ne sommes pas la LFP, nous n'avons pas besoin de clients, de PdM, etc.
SOLUTION : Ce genre de triste sire n'est que trop présent de nos jours en France aux alentours du football. Proposons lui donc les zones sinistrées moralement du football français, où il pourra se complaire en compagnie d'autres girouettes :
- Fc Maisse
- OM ou OL
- L'association des anciens envoyeurs de courriers à la Kommandantur et aussi tondeurs de la Libération
This is the end, my only friend, the end
This is the end / Beautiful friend / This is the end / My only friend, the end / Of our elaborate plans, the end / Of everything that stands, the end
Refermons ce document, et lamentons nous mes frères. La fin est proche, et une question n'a pas trouvé de réponse malgré ce document à la fois exclusif et salvateur : que deviendra le Stub ? Pour beaucoup d'entre nous, finalement, le Stub est souvent plus intéressant que le RCS des Hilali ou Ginestet. Imaginons le Stub continuer après la disparition du très Grand Racing Choucroute Saucisse... On s'inventerait des journées de championnat irréel dans HatTrick, des compos hallucinées, les gars stammtischeraient comme des fous à coups de liens youtube du but de Keshi en boucle à l'infini...
Certains le murmurent : finalement on s'en fout de sauver le club, refiler du pognon à machin pour qu'il s'achète un vélo elliptique plaqué or afin de perdre sa brioche en tapotant sur son blackberry des ordres de marché qui pourrissent son âme déjà rendue quasi inexistante par l'acculturation et la perte de toutes référence et repères qui font des gens des êtres humains membres d'une société ? Plutôt crever, non, ce qu'il faut sauver, c'est le Stub.
En vous remerciant.
Article co-écrit avec zottel.
Notes
[1] Le RCS c'est encore aujourd'hui le football total version Concerto pour détraqués : du spectacle sur le terrain [parfois le spectacle est offert par l'adversaire, mais bon] et du spectacle en dehors des terrains, au siège social, au tribunal, à Londres, sur RMC, etc. Source : Le Quotidien du Médecin
[2] Les deux derniers étant Pierre Ménes et Claude Leroidec. Source : Thèse d'Etat de M. Platini, soutenue à la Sorbonne en avril 2002 :« A jamais devant Zidane, non mais ho ».
