« Strasbourg n'a rien d'un foudre de guerre »

(racingstub) Bastia est installé en milieu de tableau à neuf points de la montée, mais reste à portée de la relégation (cinq points). Cette seconde partie de saison, on l'aborde comment et quels sont les objectifs pour la fin de saison ?
Banditu : À l'heure actuelle il serait de mauvaise foi de penser que le Sporting joue un quelconque rôle de prétendant à la montée et cela serait presque illogique de le penser tant sportivement le club peine à trouver ses marques. La relégation est proche et il faudra sûrement lutter jusqu'au bout pour se maintenir dans les eaux modestes de cette Ligue 2 aussi serrée. Bastia a, chaque année quasiment, un potentiel certain à faire valoir. L'équipe n'a rien à envier à des clubs comme Boulogne sur Mer ou encore Angers, Montpellier voire aux clubs relégués de Ligue 1. Pourtant ce qui manque à Bastia principalement et en comparaison avec ces équipes-là c'est indéniablement, à mon sens, la combativité et une certaine envie de mouiller le maillot. Les joueurs combatifs sont devenus de plus en plus rares au sein de cette équipe et nul doute qu'une meilleure politique de formation aurait été judicieuse car aujourd'hui la formation bastiaise se porte assez mal et cela incombe directement à l'équipe dirigeante et au staff technique. Bastia a aussi un entraîneur qui, au vu des quatre dernières saisons est chroniquement incompétent et je pèse mes mots. Un objectif sportif qui est avant tout basé sur la défense et une attaque qui s'en fait sentir avec une stérilité chronique. Bastia joue ses matches pour ne pas les perdre mais pas pour autant les gagner. À domicile cela se ressent d'autant plus que les occasions de but créées ne sont pas légion. J'affirme que tant que le club ne se dote pas d'un entraîneur compétent, le SCB ne pourra pour l'heure espérer autre chose qu'une malheureuse lutte pour le maintien. Le classement du SCB n'a cessé de décroître au cours des années de Ligue 2. La première année de Ligue 2 nous finissions 6e, l'an passé 12e, où serons-nous cette année ?

Cette année encore, le Sporting est plus efficace à la maison que hors de ses bases. Et puis, on a toujours l'habitude de dire qu'un déplacement à Furiani est toujours tâche ardue, pourquoi à ton avis ?
Je pense que cela relève plus du mythe à l'heure actuelle. Furiani était citadelle imprenable lorsque les joueurs étaient des combattants, sans être pour autant des stars ils savaient que jouer à Bastia voulait dire précisément quelque chose. Le don de soi, la hargne, la solidarité étaient monnaie courante. Ce n'est plus le cas actuellement. Alors certes, Bastia n'a concédé qu'une seule défaite sur ses terres depuis le début de saison et elle est intervenue face à Lens. Mais il faut noter tout de même qu'en neuf matches, le SCB a concédé quatre matches nuls, se montrant très souvent incapable de garder un résultat voire capable de marquer. Le seul Pierre-Yves André ne peut à lui tout seul porter le SCB sur le chemin de la victoire. Les attaques ne sont pas soutenues et forcément à un moment ou à un autre l'équipe s'expose aux occasions adverses. Tout cela relève encore une fois, d'une tactique que même une personne, sans être entraîneur, pourrait affirmer qu'elle n'est pas conforme aux attentes ni du club et encore moins des supporters. Le résultat du derby 6-2 est à cet égard très trompeur car le reste du temps, le SCB a toujours souffert à domicile, souvent incapable de marquer, ce qui constitue l'objectif premier du football !

Cependant, l'affluence n'est que rarement au rendez-vous...
Justement, la piètre prestation des joueurs à domicile n'incite pas les supporters à se rendre à Furiani. Mais ce n'est pas l'unique raison. Les supporters ne se reconnaissent plus dans cette équipe en manque constant d'identité. Certes, l'équipe ne peut-être constituée de 11 joueurs corses mais à compétence égale, le club préfère aller voir ailleurs plutôt que de donner la chance aux jeunes du centre, Corses ou pas d'ailleurs. L'exemple nous en est donné chaque année, pensant que ceux venus d'ailleurs sont forcément meilleurs que les nôtres. L'histoire récente nous fait affirmer que cela est faux. Les joueurs du centre peuvent constituer de très bons remplaçants de l'équipe première et certains capables de s'emparer d'une place de titulaire lorsqu'un titulaire fait défaut. Ensuite, il y a la question de la vétusté de ce stade, même pas digne du tiers monde : ouvert à tous les vents, à toutes les pluies. Ce stade traduit le non respect des personnes qui, un soir de mai 1992, ont perdu la vie à Furiani. Les élus sont les premiers coupables, les dirigeants incapables de mettre une certaine pression car ils sont à la merci d'une subvention de la communauté d'agglomération qui est propriétaire du stade. Il y a eu au mois de juin dernier un appel d'offres mais qui s'est déclaré infructueux sur les plus gros lots à attribuer. Les entrepreneurs, amis et complices des élus locaux, attendent que le prix de cet oeuvre augmente encore un peu plus pour in fine, se remplir un peu plus les poches. Il y a à l'heure actuelle une procédure de négociation qui est lancée, mais très peu ici croient en ses chances d'aboutir. Il reste une dernière tranche de travaux à réaliser à savoir la couverture de la Tribune Nord (la plus grande) ainsi que la réalisation de la Tribune Sud et sa couverture. Donc cet inconfort chronique incite les gens à rester chez eux au chaud. De plus depuis des années, il y a eu une certaine fracture entre les dirigeants et les supporters. Certes les dirigeants ont changé, mais le malaise est encore profond et il faudra encore des années pour réconcilier véritablement les deux entités. Mais le public corse a toujours été inconstant et souvent présent en cas de phase de l'histoire propice aux bons résultats. Le public reviendra en masse que lorsque le Sporting aura retrouvé l'élite du football hexagonal. Aussi on peut citer le manque de communication du club, le manque d'intérêt des dirigeants pour les supporters. Mais difficile de croire qu'à l'heure actuelle au vu des infrastructures et notamment du stade, que la Ligue accepterait encore d'accorder une quelconque dérogation au club. Surtout en connaissant toute la sympathie que peut éprouver Thiriez pour le Sporting. Enfin on pourra citer l'embourgeoisement de la société, et le développement de la diffusion de matches à la télé. La jeunesse corse qui arrive est plus intéressée par les matches de Champion's League à la TV que par un match de Ligue 2 dans le froid et sous la pluie.

Lors du mercato, le SCB a engagé Nicolas Marin, qui a réussi ses débuts en marquant face à Clermont (2-1), penses-tu qu'il puisse apporter "le truc" qui manque au Sporting ? Et est-ce que le club compte encore recruter ? Quelles sont les éventuelles pistes ?
On peut considérer Nicolas Marin comme une bonne recrue au vu du faible niveau affiché sur le côté droit de l'équipe. Pour son premier match il aura permis au Sporting d'accrocher une victoire précieuse, à la faveur d'un tir magnifique. Le déblocage de ce match ne pouvait intervenir que par un exploit individuel, les Bastiais s'étant montrés jusqu'ici peu capables de créer du danger devant. Maintenant il reste à confirmer les bonnes choses entrevues durant ce match, mais encore une fois un seul joueur ne peut à lui seul apporter des victoires, il faut une cohésion, il faut une tactique, il faut de l'envie et de l'abnégation. Concernant le mercato, le club a mis la semaine dernière Eric Cubilier à l'essai, lui qui avait résilié son contrat avec Nantes il y a peu. Casoni l'a jugé apte à pouvoir apporter quelque chose de plus à l'équipe. À l'heure actuelle, le joueur discute des termes du contrat avec les dirigeants, cela devrait aboutir rapidement. Cela dans le cadre de préparer la saison prochaine selon les propos des dirigeants. Mais le club avait pour ambition première de recruter un véritable attaquant de pointe, ou de se faire prêter un attaquant de première division qui était en mal de temps de jeu. Visiblement il n'a pas encore été trouvé et à quelques jours de la fin du marché, il est peu probable qu'un nouveau renfort vienne compléter l'équipe. Pourtant l'attaque aurait été le premier secteur à renforcer. Si aucun attaquant n'arrive d'ici là, il faudra espérer que Pierre-Yves André ne subisse pas de blessure, dans le cas contraire et au vu de la « André dépendance » dont est victime l'équipe, le championnat risque d'être très dur jusqu'à la dernière journée.

Ce vendredi, on assistera à la 3e rencontre de la saison entre Corses et Alsaciens. Quels souvenirs te laissent les deux premiers affrontements ?
Les deux premiers affrontements ont constitué pour les supporters une certaine confiance en cette équipe, mais cela n'a pas été confirmé dans les matches qui ont suivi. Pour le match concernant le championnat, l'équipe avait fait jeu égal durant tout le match avec les Strasbourgeois, tenant la dragée haute à cette équipe. Mais il est à regretter la timidité sur ce match des Bastiais, comme trop souvent d'ailleurs, car la défense strasbourgeoise n'inspirait pas une grande confiance et avec un peu plus d'ambitions il faut le dire, les Bastiais auraient pu revenir avec les trois points. Car même en jouant défensif, le SCB n'aura subi qu'un quart d'heure durant ce match, à savoir le dernier. Avec une autre approche de jeu, le résultat aurait pu être tout autre. Ce but de Carlier dans le temps additionnel paraît peut-être cruel mais en tout état de cause il fallait plus oser que ce que l'on a fait.
Concernant le match de Coupe de la Ligue, le SCB a su se montrer à son avantage, pourtant le tirage nous envoyait encore une fois à l'extérieur et donc à Strasbourg. Peu de personnes croyaient en une qualification et pourtant la prestation bastiaise a été satisfaisante. Je continue à dire qu'il n'y a strictement rien à envier à Strasbourg, Lens, Metz et consorts. Quand on veut on peut, surtout lorsqu'on a les moyens de le faire. Cherrad avait été décisif sur ce match-là et il faut regretter ses blessures incessantes.

Strasbourg vient de concéder une cuisante défaite à Reims (4-1) et semble être un peu dans la tourmente. Du côté bastiais, on aborde cette rencontre avec sérénité ou redoute-t-on un sursaut d'orgueil des Alsaciens ?
Je pense que le Sporting ne se soucie jamais du contexte dans lequel évolue son adversaire d'un soir. Le principal adversaire du Sporting, c'est le Sporting lui-même. Donc du moment que l'équipe a la volonté de remporter un match, que l'entraîneur met à la disposition de cette équipe les moyens susceptibles, sur le terrain, de le remporter, alors aucune équipe n'est supérieure sur un match à Bastia. Là encore tout est question de vouloir. Strasbourg n'a rien d'un foudre de guerre, ses résultats sont en dent de scie et je pense que les adversaires de ces clubs là sont trop respectueux. Contre les prétendus gros de cette Ligue 2, il faut oser, il faut jouer pour gagner. On voit bien d'ailleurs, que ce genre d'équipe est capable de réaliser de piètres prestations. Malgré cela il y a toujours une crainte pour les adversaires de jouer contre ce genre d'équipes. Tout sera question sur ce match là de la force mentale de Bastia. Si Bastia joue comme il doit jouer, avec la tactique qu'il doit avoir lorsqu'on joue à domicile, alors il remportera le match. Dans le cas contraire ce sera difficile.

Le Racing compte dans ses rangs un certain Boubacar Kébé. On ne reviendra pas sur la triste anecdote, mais comment sera-t-il accueilli par les supporters bastiais selon toi ?
Déjà il serait bon de savoir si le joueur fera le déplacement. Dans une entrevue accordée à France 2 Foot l'an passé, il avait affirmé qu'il ne viendrait plus jouer à Furiani. À partir de là, difficile de se projeter. Mais cette histoire instrumentalisée de toute pièce par ce joueur, avec l'aide des médias et de la Ligue n'est pas pour apaiser les tensions. Il est bon de rappeler quelques points de cette affaire : la première tout d'abord qui s'est déroulée à Libourne. Le joueur coupable d'un geste insultant envers le parcage bastiais (supporters bastiais qui n'étaient ni organisés et qui se sont rendus par leurs propres moyens au stade sans une aide quelconque du club), se fait logiquement expulser. Bastia remporte le match 4-2. Suite à cela il n'est en rien question d'insultes racistes, mais ce n'est qu'une fois avoir su que les dirigeants libournais allaient le sanctionner, qu'il a inventé une histoire. Après le match les dirigeants bastiais et libournais ont bu un verre ensemble et il n'était nullement question d'insultes à ce moment là. Mais il n'en fallait pas moins pour que les médias s'emparent immédiatement de l'affaire et la Ligue avec eux. Le joueur dit avoir prévenu l'arbitre central d'insultes à son encontre, l'arbitre affirmera qu'il n'a jamais été averti. Le juge de touche dit alors avoir entendu des insultes racistes alors que ce dernier est au centre du terrain et que les faits se produisent au poteau de corner. Des supporters libournais affirmeront eux aussi n'avoir rien entendu. Résultat des courses : La LFP décide le retrait d'un point à Bastia sans aucune preuve. Depuis le tribunal administratif a rendu le point à Bastia, mais les médias bien entendu ne s'en seront pas fait l'écho. Le joueur affirmera ensuite qu'il avait déjà été victime d'insultes racistes lorsqu'il était venu jouer la saison précédente avec Libourne à Furiani. Petite anecdote : il n'était même pas sur la feuille de match !
La deuxième affaire éclate : celle de la banderole. Il faut rappeler ici qu'elle n'était en aucun cas raciste et en aucun cas homophobe. La commission de discipline décide un match à huis clos. Thiriez fait appel de la décision dans le quart d'heure qui suit la décision. Résultat des courses : deux points en moins pour Bastia. La procédure administrative est toujours en cours pour tenter de récupérer les deux points. Quand on sait qu'une banderole de plus grande ampleur a pénétré au sein du Stade de France, il est à mettre à l'index la responsabilité de Thiriez. Seulement Paris restera Paris, et ce club a d'ailleurs réintégré la Coupe de la Ligue sans aucune autre sanction.
Chacun en tirera les conséquences et devra prendre ses responsabilités.
De plus les six petits mois passés par Kébé du côté de Nîmes sont un élément paradoxal. Un club qui lutte pour sa survie en Ligue 2 se permettrait de laisser partir un des meilleurs éléments de leur effectif même à un bon prix ? Et si c'était pour des raisons d'ambiance dans le groupe avec ce genre de joueur ?

De quels Strasbourgeois te méfies-tu plus particulièrement ?
Pour être tout à fait franc, je ne m'intéresse guère aux autres clubs que le SCB car je pars du principe que Bastia peut gagner s'il le veut et qu'importe l'adversaire en face. Alors bien sûr, Strasbourg a de bons atouts, tels que James Fanchone qui permet souvent aux Alsaciens de remporter des matches et s'avère être un bon finisseur. Sur le match aller que j'ai pu voir, Belghazouani qui avait une technique au-dessus de la moyenne, malheureusement pour lui ses affaires extra-sportives lui auront coûter cher. Il était à un moment donné dans le viseur du SCB pour tenter de le récupérer, mais le joueur a semble-t-il des prétentions salariales trop hautes pour le club. Pourtant sa famille est en Corse, mais visiblement cet élément n'a pas eu d'effet. Il est actuellement à l'essai à Sochaux donc la piste est complètement gelée a priori. Johansen (NDLR : on pardonnera à notre ami bastiais cette maladresse !) au milieu est un véritable métronome et a une bonne vista. Il a pour lui un certaine expérience tout comme Ducrocq. Un des bons éléments est également Cassard qui réalise souvent des prouesses et sans lui, qui sait si Strasbourg serait encore aussi haut au classement.

Comment vois-tu le déroulement de la rencontre et quel est ton pronostic ?
Si Bastia débute le match en étant prudent et attentiste, à coup sûr cela lui sera préjudiciable. Reste à l'équipe à prendre le match en mains, à imposer son rythme, sa cadence. J'espère simplement que l'équipe n'aura rien à se reprocher au terme des 90 minutes de jeu. Après, si tout a été fait pour gagner et que la malchance est au rendez-vous, pour ma part, je serais tout de même heureux. Il faudra aussi compter sur Novaes, le meilleur gardien de Ligue 2 actuellement. En espérant qu'il n'ait pas trop de travail à réaliser.
Pour répondre directement à la question je mise sur 2-1 pour le Sporting.

Par ailleurs, Pascal Camadini a assisté à un match du SCB pour le Racing... Quel souvenir a-t-il laissé dans sa Corse natale ?
Camadini est très souvent en Corse et rentre dès qu'il le peut. Il était revenu en 2005 pour tenter de remonter le club en première division. Malheureusement cela n'a pas pu se réaliser et au mercato d'hiver suivant, Strasbourg faisait une offre que le club bastiais ne pouvait refuser au vu de la situation financière de l'époque. Strasbourg était en Ligue 2 à ce moment là et promettait une prime de 150 000 € si le RCS atteignait l'accession. C'était chose faite.
Après Camadini reste avant tout Corse et aura réalisé de belles choses avec Bastia. Sa bonne entente avec les dirigeants strasbourgeois lui aura permis d'avoir un poste au sein du club, ce qui est très bien pour lui. Dommage que cela ne ce soit pas produit à Bastia, il aurait pu intégrer pourquoi pas un poste dans le secteur sportif.
Il laisse en majorité une bonne image de lui aux supporters bastiais.

Un grand merci à Banditu pour ses réponses exhaustives, intéressantes et précises ! Vous pouvez lui faire un coucou sur Forza Bastia !