Un match crucial

Avec le déplacement à Lens, le Racing a 90 minutes pour se racheter des dernières déconvenues et revoir ses ambitions : alors qu'une victoire le replacerait sur de bons rails et permettrait de viser une place en coupe intertoto, une défaite provoquerait forcément un enlisement dans le ventre mou du championnat, voire pire.

Le fait que les Bleus se présentent chez les Sang et Or sans véritable attaque, en devant combler les absences de Niang et Chapuis, tout comme les effets du départ de Ljuboja qui ne seront visibles qu'au fil des matches, laisse présager une dure épreuve pour le Racing. Une victoire ne semble possible que sous la forme d'un hold-up. Une équipe lensoise poussée par son public formidable ne peut être sous-estimée et ce, même si les joueurs partis à la CAN manqueront indéniablement au onze de Joël Muller.

Que peut donc véritablement espérer Strasbourg ? Comment envisager rapporter de Bollaert ces trois points si importants, si nécessaires afin d'éviter la perspective d'un combat lassant pour le maintien dans une Ligue 1 retrouvée il n'y a que deux ans ?

L'incroyable dénouement de la dernière confrontation entre ces deux équipes à Lens, avec l'ouverture du score lensoise à la 90ème minute suivie d'une égalisation invraisemblable (et bien cruelle pour les hommes du Nord) dans le temps additionnel peut donner espoir aux supporters strasbourgeois. D'ailleurs, les prestations alsaciennes à l'extérieur semblent bien meilleures (bien qu'infructueuses) que l'an dernier. Mais face à un RCL au bord de la crise, compter sur un signe du destin et une efficacité offensive soudainement retrouvée serait suicidaire et stupide.

Car Lens doit gagner à tout prix, son avenir et celui de son entraîneur Joël Muller au sein du club en dépendent. Comme les Alsaciens, Lens n'a pas encore remporté de match en 2004 et devra se battre pour le maintien en cas d'échec. Pour Strasbourg, miser sur la nervosité de l'adversaire pourrait donc être une clé du succès. Malheureusement, la probable titularisation de joueurs comme Mouloungui, Abdessadki ou Camadini, rarement titulaires et/ou convaincants cette saison, laisse prévoir la même tension du côté des Bleus et Blanc.

Kombouaré devra espérer avant tout que la défense tienne le coup : le secteur défensif de l'équipe a été le maillon faible des derniers matchs, livrant des prestations allant du très moyen au catastrophique et ridicule. Les éternelles critiques pourront dire que ces déboires sont la conséquence d'un mauvais coaching. Ceci est un jugement à la fois trop hâtif et de mauvaise foi. A la fin d'un match, on connaîtra toujours la bonne méthode, qui était à choisir, mais que reprocher à un entraîneur dont la moitié de sa défense est blessée ? Devaux ayant été "out" quasiment toute une demi-saison et Dorsin inexpérimenté à un poste de défenseur axial, un match comme celui contre Guingamp ne peut servir comme référentiel d'évaluation d'un entraîneur. Il faut également se rendre compte que, bien que Strasbourg ai obtenu le maintien sous la direction d'Ivan Hasek, son niveau de jeu a bien augmenté depuis l'arrivé de Kombouaré. Au-delà de cette poisse qui suit le Racing sous forme de blessures, il est important que le club songe à recruter un défenseur expérimenté, au plus tard pour la nouvelle saison. Enfin, le retour de blessure de Kanté, pilier de la défense, risque de tarder.

Au milieu de terrain, l'absence de Pontus Farnerud et de Corentin Martins nuira indéniablement à la transmission du ballon vers l'avant. On comptera à nouveau beaucoup sur Bassila pour la récupération des ballons et les duels aériens qu'il semble enfin maîtriser. Beaucoup de responsabilités reposeront également sur les épaules du jeune Guillaume Lacour... quant à Ehret, Abdessadki et peut-être Camadini, on peut douter qu'ils auraient joué si l'équipe avait été au complet. Le Pen, un des meilleurs Strasbourgeois de la saison, devra distribuer au mieux ses ballons à Mouloungui, adepte des percées rapides que l'on a appris à apprécier du côté de la Meinau.

Eric Mouloungui a, malgré des débuts encourageants, déçu cette saison. Son physique semble lui porter préjudice plus qu'autre chose. Sa détente n'a encore surpris aucun gardien et son vif instinct de buteur est éteint. On peut évoquer un possible manque de confiance du jeune Gabonais. Une titularisation pourrait donc l'aider à enfin exploiter son potentiel bien visible la saison dernière et lors de quelques matchs cette saison. Mouloungui aura un rôle de patron ce soir sur le front de l'attaque... il n'appartient qu'à lui de jouer pleinement son rôle et de conduire les offensives alsaciennes. Reste à savoir si son jeu peut être complémentaire à celui de Salim Arrache, auteur d'une passe décisive et d'un but face à Libourne et qui pourrait bien connaître sa première titularisation en Artois.

Que risque-t-il d'arriver à notre Racing si le match de demain, comme le prévoie la plupart des « bookmakers » se conclut en défaite ? Le fossé entre son classement et les places de relégables a continuellement diminué au fil des matchs depuis le début de l'hiver, toutefois, il est encore trop tôt pour craindre une descente durable aux enfers. En cas de défaite, il faudra sûrement commencer par revoir objectifs et ambitions pour le reste de la saison, une qualification européenne ne serait dans ce cas plus envisageable. Mais est-ce réellement l'objectif des dirigeants strasbourgeois ? Le Racing n'a retrouvé l'élite qu'il y a deux saisons. Sa treizième place de l'an dernier était pour le moins honorable pour un promu mais elle ne donne pas le droit de rêver soudainement (défaut typique du supporter alsacien). A moins qu'un jeune joueur comme Alexander Farnerud ou Abel Mphela, encore dans l'ombre des grands, surprenne à un tel point d'entraîner l'équipe vers de plus hautes sphères.

Espérons toutefois que ce cas n'aura pas besoin d'être pris en considération. Un nul ou une victoire à Lens, et le reste de la saison sera forcément abordé avec plus de sérénité et de confiance. Pour que le succès s'installe et ce, dans la durée, un attaquant efficace devra enfin s'imposer au sein de l'effectif en l'absence de Mamadou Niang. Sans Ljuboja, la remarquable moyenne de buts marqués par l'attaque strasbourgeoise risque sinon d'en souffrir