L'heure de Zenke

De Kaduna à Strasbourg

Né la veille de Noël (24 décembre) 1988 à Kaduna, ville industrielle du nord du Nigéria, le jeune Simon Zenke aurait pu rêver d'imiter Jay Jay Okocha et ses Super Eagles, qui brillaient alors sur le plan international (vainqueurs de la CAN 1994 et huitièmes de finalistes de la Coupe du Monde la même année). Pourtant, c'est plutôt vers Nollywood que ses yeux se tournent. En effet, on l'ignore souvent mais l'industrie cinématographique nigériane est incroyablement développée. Ainsi, du haut de ses sept ans, tout en jouant au football dans sa ville natale, Zenke caresse le rêve de devenir acteur. Mais encouragé par des joueurs du pays, et notamment son cousin, il se tourne entièrement vers le sport. A 15 ans, il rejoint le club de sa ville, financé par des joueurs professionnels comme l'international Celestine Babayaro. Tout va alors aller très vite : après seulement quelques entraînements, les dirigeants de Niger Tornadoes, un club de première division, réputé pour donner leur chance aux jeunes joueurs, lui propose de faire un essai qui se concrétisera deux mois après par un contrat de deux ans. Au terme de sa première saison, son bilan prometteur de sept matches, un but et trois passes décisives au poste de milieu droit lui ouvre les portes de l'équipe nationale des moins de 17 ans. Lors de sa première sélection en premier match amical, Simon se permet même de marquer un triplé et de gagner sa place pour disputer la Coupe d'Afrique des Nations de sa catégorie d'âge. Ses trois buts n'empêcheront pas l'élimination de son équipe, mais dès lors le jeune buteur prometteur affolera les recruteurs européens. Comme souvent lors des compétitions juniors, des représentants de clubs scrutent les performances des meilleurs joueurs. Ainsi, Zenke recevra des sollicitations du Betis Séville, de Crystal Palace et de Tottenham. Mais c'est le Racing par l'intermédiaire de Philippe Thys, qui avait déjà découvert Eric Mouloungui au Gabon, qui le convainc finalement d'opter pour le Racing.

Un cadre chez les jeunes

Non francophone, ses débuts en Alsace sont difficiles. Il trouve tout de même l'aide du Sud-Africain Michaël Nkambule, qui l'aide à s'intégrer au sein du centre de formation. Très vite, le jeune attaquant au physique de bûcheron bodybuildé débute avec l'équipe des moins de 18 ans et travaille d'arrache-pied afin de combler ses lacunes techniques et tactiques. La récompense de tout cela arrivera avec la victoire en coupe Gambardella en 2005, à laquelle il a contribué par une égalisation salvatrice en quart de finale contre Metz et par le troisième but du succès final contre Lyon. Dans la foulée, il débute en CFA, à 18 ans, niveau qu'il ne quittera plus par la suite. Lors de la saison 2006/2007, après avoir inscrit un but en match amical contre une sélection régionale, il jouera 11 rencontres avec l'équipe réserve et disputera la CAN juniors avec sa sélection. Des performances qui lui vaudront de signer son premier contrat professionnel d'une durée de trois ans, un gage de sûreté quand on sait que Monaco, Sochaux, Tottenham, Manchester et le Feyenoord Rotterdam suivaient toujours avec intention le parcours de Zenke. Son contrat en poche, il rejoint sa sélection nationale qui s'est brillamment qualifiée pour le Mondial des moins de 20 ans au Canada. Jusque là tout va donc bien pour le jeune attaquant du Racing. C'est sur place, pendant le stage de préparation que les choses vont se gâter. Au cours d'un entraînement, sa cheville gauche se tord. Bilan : la Coupe du monde, il la vivra du banc. « C'était vraiment très difficile pour moi. J'attendais cette Coupe du monde. C'était un rêve pour moi », rage-t-il alors. Le rêve brisé, il assistera impuissant au parcours de ses coéquipiers. Le Nigeria atteint les quarts de finale, se fait lourdement battre par le Chili (0-4) et Simon Zenke reprend la direction de Strasbourg.

Débuts réussis en Ligue 1

Devenu un titulaire au sein de l'équipe réserve, le Nigérian participe également de plus en plus aux entraînements des professionnels à l'aube de cette saison 2007/2008. Après des débuts gâchés par des blessures, il ouvre son compteur but face à la réserve de Nancy, seulement deux minutes après sa rentrée en jeu. Dès lors, il ne quittera quasiment plus le onze de François Keller, et terminera ce nouvel exercice avec un bilan prometteur de sept buts en 24 rencontres. Mais cette saison sera surtout marquée par ses grand débuts avec les professionnels du Racing. Impuissant devant l'effondrement de son équipe, Jean Marc Furlan lui donnera sa chance en fin de match face à Caen. Pas aidé par ses coéquipiers au cours de cette débâcle, Zenke aura tout de même montré de belles qualités physiques durant ses huit minutes de présence. Face à Marseille, dans un stade qui le faisait rêver plus jeune (« J'aime ce club depuis que j'ai vu les buts de Jean-Pierre Papin au Vélodrome. »), son entrée en jeu sera plus précoce et surtout plus prolifique. En effet, il n'aura fallu attendre que huit petites minutes pour voir l'attaquant tromper Mandanda. Un but fêté par un triple flip, dans la plus pure tradition nigériane (Julius Aghahowa, ObafeM. Martins, etc.), qui lui permet de marquer les esprits et d'espérer gagner sa place au sein du groupe professionnel pour la saison à venir en L2.

Et maintenant, la confirmation ?

Malgré le départ de Kevin Gameiro pour Lorient, le secteur offensif du Racing reste aujourd'hui bien garni, notamment avec les nombreux retours de prêts. Bien qu'on puisse affirmer que des joueurs comme Tum, Carlier et Perbet ne soient pas dans les plans de Jean-Marc Furlan, Simon Zenke aura à faire face à une forte concurrence. Si ce dernier n'espère pas être titulaire, il devra tout de même faire ses preuves afin de gagner du temps de jeu. Cela passe évidemment par des effort à l'entraînement, notamment pour... perdre du poids ! L'entraîneur alsacien aurait d'ailleurs conclu un accord avec lui: « J'ai passé un deal avec Simon Zenke. Il peut avoir trois jours de vacances en plus mais doit revenir avec 3 kg en moins. »

Reste que la relégation en L2 du Racing devrait permettre à des jeunes de confirmer leur potentiel et que Zenke fait parti de ceux là. A lui désormais de faire son trou ...