C'était le week-end du match contre Nancy II, juste avant la révélation urbi et orbi du joyau graphique et typographique qu'est devenu notre glorieux écusson. Le très grand Marc Keller avait tenu à nous recevoir dans son manoir des environs de Strasbourg, où il se retire pour penser et façonner le Racing. C'est une invitation aussi mystérieuse qu'excitante que nous avions reçue, le texte en était sobre : « Bonjour les amis, ici il fait beau, je vais bien, les gens sont gentils et je mange bien. Le vendredi il y a des frites. Je vous invite demain dimanche à venir découvrir à la maison, et avant les gens, un truc formidable. Gros bisous. Marc Keller (Marc hein, pas Marthe, hi hi hi) ».

C'était le prélude d'une journée d'échanges à bâtons rompus, durant laquelle nous découvrîmes le nouveau nom du club ainsi que cet écusson, qui émerveille les enfants, et fait déjà trembler l'Europe tout en poursuivant une vocation pédagogique géographique (i.e. il mentionne clairement que Strasbourg est en Alsace).

Autrement dit, nous avons eu le privilège de causer de longues heures avec l'ex-international et ex-footballeur le plus diplômé de France ! Presque honteux de lui voler de son précieux temps, qui est aussi le temps du merveilleux Racing Club de Strasbourg CUS Bas-Rhin Alsace (à l'ouest du Bade Wurtemberg, sur la gauche en descendant le Rhin) France Europe Monde Système Solaire Nuage d'Oort Bras d'Orion Voie Lactée, nous avons pu quasiment toucher de nos doigts l'histoire en marche grâce au récit intense et humble de Marc Keller, grand timonier actuel du Racing-qui-appartient-à-l'Alsace-rapport-à-c'qu'elle-met-l'argent-pigé ?

Dans l'atelier du magicien

Bonjour les amis, bienvenue dans mon humble demeure. Quelle surprise alors dites donc. Attention, ne tombez pas dans la piscine, faites juste le tour du court de tennis. Entrez, entrez, « mi kawa es tou linda de souza comme on dit en Centrafrique »

Après avoir mis les patins, nous suivîmes notre hôte jusque dans sa cuisine. Toujours simple, Marc nous proposa un verre.


Marc Keller : « Allez les p'tites têtes, un verre de picrate ? Faites-moi plaisir ! Hmmmm (il gémit à cause de l'effort) Mais elle résiste la coquine. Hi hi hi. Mince, attendez, j'ai les mains humides. Bon, merde, on laisse tomber. Un Coca ?

Le choeur des journalistes : Un Elsass Cola alors ! Hu hu...

MK : (...)

CJ : Heu, bon, ben un Coca. Bon, sinon, Marco, comment vous est venu cette idée de génie de changer le nom du club, ainsi que le logotype pour les papiers à en-tête ?

MK : J'ai la conviction que le club doit franchir un palier. Bon, comme le frère de Philippe Ginestet n'est plus au club (je ne sais pas trop pourquoi d'ailleurs, il va falloir que je tire ça au clair avec les Ressources Humaines) pour m'aider dans le recrutement, mon équipe et moi-même avons décidé de faire l'impasse sur l'aspect sportif. On n'a donc pas passé trop de temps sur le recrutement. Il y a trop d'aléas. Vous savez, je suis diplômé de gestion, j'ai vu trop de clubs de football sombrer à cause des revers imprévisibles que réserve le sport. A bas le sport ! (rires)

Heureusement, en tant que chef d'entreprise sur-diplômé, je sais m'entourer, et j'ai organisé un brainstorming avec le comptable, mon expert en communication, mon coach en transaction interpersonnelle behaviouriste, Simone Morgenthaler ma guide spirituelle et Philippe Capelle, parce qu'on a toujours besoin d'un Philippe. Enfin je crois.

Après une séance de cri primal collectif sous la cascade du Nideck suivie d'un exercice de team-building qui consistait à fumer des lianes la nuit dans un trou de guerre à Neuwiller-lès-Saverne ça nous est apparu comme une évidence : il fallait changer l'identité visuelle du club !

CJ : La carte d'identité ?

MK : Non, l'identité visuelle, excusez le jargon technique, c'est un peu élitiste, je veux dire le dessin qui est collé sur le textile de visualisation mercatique de l'identité visuelle sponsorique.

CJ : ... supersonique ?

MK : Mais non ! Le machin qu'on met sur le maillot !

CJ : Haaaaa, l'écusson !

MK : Oui, voilà c'est ça, purée les truffes.

CJ : OK donc c'est votre idée à cause de la séance collective au Nideck ? nous on croyait que c'était Philippe Richert qui avait exigé le changement de nom contre du pognon, et du coup fallait changer l'écusson.

MK : Comment, contre de l'argent ? Mais ce serait affreusement vulgaire. Mais non, voyons ! Ceci dit le fric tombait bien, il faut bien avouer qu'on n'a plus un sou en caisse. On voit le fond. Ce n'est pas une image, on le voit, le fond. Pour vous donner une idée, vous vous souvenez d'Arrache ? Vous l'aviez déjà regardé dans les yeux ? Pareil. Brrrr.

Genèse d'une idée

Le choeur des journalistes : Et cette nouvelle identité visuelle, Seigneur Marc, comment c'est arrivé ?

Marc Keller : Comme il bosse à la région qui met l'argent, Philou (i.e. Richert) avait réussi à obtenir plusieurs maquettes. Toutes plus belles et furieusement identitaires les unes que les autres. C'était difficile de choisir, mais finalement on a pris ça :



CJ : Non allez, sérieusement... (rires)

MK : Vous riez devant le beau vous ?

CJ : Ho merde, c'est sérieux... Heu, non, c'est la sidération... heu... Mais, heu, pour arriver à un tel résultat vraiment, heu, enfin, carrément, heu, rond, la Région avait dû faire appel à une équipe de designers exceptionnelle ?

MK : Vous allez encore rire, mais non.

En fait, au départ, Philou avait une idée, il pensait à un truc encore plus identitaire. Il voulait « Richert Club de Strasbourg », il avait même un projet de blason très novateur. Tenez, je l'ai là, dans mon portefeuille :



Mais il y avait des conflits avec ses droits à l'image qui sont gérés par Réservoir Prod. Donc malheureusement ce n'était pas possible. Dommage.

Du coup il a fait appel à une start-up innovante du design logotypique. Je dis start-up ? Pour être précis, c'est un des conseillers de Philou dont un petit-neveu qui vient d'avoir son « Brevet Académique de Conceptiongraphiquepostmoderneetcommunicant », un BAC ça s'appelle, qui nous a aiguillé vers cette solution. La start-up s'appelle Kévin.

Kévin a tout fait sur son iMac. Le budget était minuscule, le brave garçon a même tout téléchargé Photoshop avec son âne ! Ou plutôt, sa « mule » comme il disait. J'ai pas trop compris le rapport, mais le résultat est là, et il est indiscutable.

L'étincelle du génie

Le choeur des journalistes : Ho, mais il y a un 'A' bizarre là, le Racing se lance dans l'Accrobranche pour se diversifier ?

Marc Keller : Mais enfin non, c'est pour Alsace, Strasbourg c'est en Alsace oui ou non ?

CJ : Heu oui, mais on sait ça, sans déconner... heu... mais... haaaaa... d'accord. Ha oui, c'est vraiment super. Comment une idée aussi lumineuse a-t-elle germé, hi hi hi hi ?

MK : Hé bien le conseiller/grand-oncle de Kévin nous a expliqué que l'idée du 'A' était venue naturellement pendant une séance de créativité innovante extrême. Apparemment ça consiste à renifler de la farine dans une salle de réunion, en groupe.

Un type de la task-force de réflexion se serait écrié « Hey ! Et si on collait 'A' au bout du nom ?! Ça fait jeune, c'est frais. Ben oui, un 'A' derrière, comme à l'arrière des bagnoles des apprentis conducteurs. Ça sent sa 'nuit du bac', ça a du pep's, c'est bath. Et comme ça fait djeunz, personne ne remarquera que c'est pour 'Alsace' vu que bon, c'est quand même super niais de préciser que Strasbourg c'est en Alsace. En particulier pour le foot, ils ont peur qu'on confonde avec Strasbourg en Haute-Corse ou quoi ? Mais qui m'a foutu une contrainte pareille dans le cahier des charges, MERDE ? - Heu, Jean-Louis, c'est le Président qui décide. - Ha oui quand même. Parfois je me demande si je ferais pas mieux de m'occuper de la commission 'grand hamster' - Jean-Louis, il a aussi un 'Alsace' à la fin - Qui ça ? - Ben, le grand hamster - (soupir) Je suis vraiment trop vieux pour ces conneries, tiens, repasse moi la Francine fluide. ».

Voilà, ça s'est passé comme ça avec Jean-Louis et Kevin, enfin à la task-force. Ils sont forts les mecs. Muni de ce concept aussi béton qu'hypra fun, rassembleur tout en étant générationnel, bref, comme les gaufrettes Verkade, à la fois croustillant et fondant, croustifondant quoi, combiné à un design graphique innovant, on était sûrs d'avoir tapé dans le mille, à nous la Ligue des Champions !

CJ : C'est magnifique. Mais il n'y pas eu un appel d'offres ? Le petit-neveu d'un conseiller de la Région ça fait un peu ...

MK : ... synonyme ? Montceau-les-Mimes ? Charisme ? Priapisme ?

CJ : On pensait plus au népotisme...

MK : Ha oui c'est ça, figurez-vous qu'on y a pensé aussi. Pour éviter tout soupçon de névrotisme on a voulu consulter les réalisations de la boite, enfin de Kévin, afin de s'assurer du sérieux du prestataire.

On a vu son portfolio, et là, on a été impressionnés. Par exemple, l'agence a conçu des modernisations positivement hyper innovantes de marques internationales, mais aussi de machins publics. Regardez plutôt, y'a des heures de boulot là, attention, c'est pas du design au bic jaune sur une nappe de la cafétéria du SUMA, préparez vous à rentrer de plain-pied dans le nouveau millénium de la conception graphique avant-gardiste :




Ca jette non ?! Du coup on a signé un contrat sur 15 ans avec Kévin. C'était inespéré. On est comme ça au Racing.

Feu d'artifice d'idées, cascade d'inspiration

Marc Keller : Une fois qu'il tenait son idée du 'A' pour Alsace, notre agence, enfin Kevin, a bossé super rapidement sur les projets de nouvel écusson. En 2 heures on a reçu par pneumatique d'ordinateur plusieurs esquisses plus magnifiques les unes que les autres dont, bien sûr, le résultat actuel. Regardez, j'ai quelques exemples là.

La première ici, on l'a trouvé un peu sobre, on n?était pas sûrs que le lien avec l'Alsace était évident. Vous savez, avez les clients qu'on a, heu avec les supporters je veux dire, il fallait un truc trèèès clair hein. Vous voyez le genre des mecs hein... c'est pas pour les soirées de l'ambassadeur ces gars-là. Enfin je les connais pas, faut pas déconner. Mais vu le genre, ça doit plutôt être l'ambiance glacière en plein air, bref. Voici :

Tenez, autre proposition ! Alors là bon, vu que toute l'Alsace met du pognon dans le truc, il semblait évident qu'il fallait inclure un truc du Norin. Moi j'aimais bien. Mais apparemment faire sauter le bâtiment bizarre tout bleu était un changement trop radical. Toujours pas compris pourquoi, je vois pas ce que Notre Dame de Paris fout sur le machin depuis le début moi. Mais bon. Regardez-moi le travail :

Et là, encore une trouvaille, très jeune, bibop, modem, fax tout ça. Mais on a eu peur que ça vieillisse mal :

Sinon, il avait fait ça aussi. Apparemment ils s'en sont servi pour attirer je ne sais plus quel pigeon pour qu'il vienne jeter du pognon par les fenêtres dans le... heu, non, je veux dire, pour qu'un généreux donateur motorisé participe à la renaissance de le club. Ahem :

Il y en avait encore d'autres... comme on ne savait plus comment s'en sortir on a choisi le blason à pique-nique-douille, comme un clin d'oeil au destin chamarré du nouveau RCS qui s'ouvre devant nous.

Des logos participatifs, pour le nouveau Racing

Le choeur des journalistes : C'est vraiment épatant, oh oui, épatant. Avez vous pensé à suivre d'autres pistes, ce qui semble plus adéquat pour éviter qu'on vous accuse de ce fameux népotisme ?

Marc Keller : Oui, bien sûr ! Il n'y avait pas que Kévin. On a aussi lancé en parallèle un concours pour les clien... les supporters. Un peu comme pour les écharpes la saison dernière. Le concours d'écharpes était une idée géniale de Frédo (tiens d'ailleurs, c'est curieux, je réalise que Frédéric Sitterlé ne vient à aucune réunion, va falloir que je vérifie aussi avec les Ressources Humaines). On a copié sa méthode; organiser un concours, ne tenir compte d'aucune des propositions reçues. Peu importe, ça reste festif et convivial, ça donne l'impression aux gens de servir à quelque chose.

Tiens, j'ai encore les meilleures propositions que nous avaient soumises l'Union Fédérale des Consommateurs, mince non, comment ils s'appellent déjà les types ?

CJ : La Fédération des Supporters du RCS.

MK : Ah ouais, un truc comme ça, enfin bref, voilà les machins.

D'abord Strasbourg, bientôt le Monde !

Marc Keller : Pour vous dire comment on a été chanceux d'avoir la collaboration de Kévin sur ce projet, il nous a dit qu'il avait été contacté par de nombreux clubs de grande envergure pour redesigner leur identité visuelle. C'est assez fabuleux de faire en quelque sorte désormais partie d'une grande famille prestigieuse à travers lui. Regardez ça, j'en ai les larmes aux yeux, rien n'arrête ce garçon :








Mais ce n'est pas tout, comme vous m'êtes sympathiques, j'ai une autre surprise pour vous. Dans sa marche vers la gloire, Philippe Richert a un plan décennal pour faire briller l'Alsace à travers le monde grâce au football. Il est déjà en contact avec plusieurs clubs européens pour associer l'image de l'Alsace à tout ce qui bouge. Kévin a déjà créé quelques joyaux, allez, hop, je vous les livre tout de go et illico :







CJ : Doux Jésus !! (Cris de joie)

Et si on danse ?

MK : Mais vous savez, gouverner c'est prévoir, comme disait Frédéric Lefebvre. Ma charge de Président m'oblige à envisager le pire.

CJ : Le pire ? Vous nous faites frémir Président !

Oui, je sais, mais ça c'est à cause de ma silhouette hyper fit malgré ma retraite sportive. Non, je dois vous dire que je dois envisager l'avenir du Racing si la Région venait à faire faillite, ou à tomber dans les griffes du PS aux prochaines élections, c'est pareil. Donc bon, mes services ont prospecté en France et à l'international, et nous avons une solution de repli si le pire devait arriver. C'est une solution qui a l'avantage de nous permettra de garder le nom, enfin les initiales, car je sais que certains cli... supporters arriérés sont assez rigides sur le nom.
C'est un accord avec l'Albanie, ils ont un partenariat avec une clinique du Kosovo qui livre des organes frais sous 24 heures, ça devrait nous apporter un gros plus dans des cas comme Kéhi ou pour le retour de Gargorov prévu pour le mercato hivernal. Et là, Kévin a encore fait preuve de réactivité. Vous allez voir, c'est pas dégueu'.

CJ : Haaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa. (évanouissements d'extase, chute lourde des corps transis d'admiration)

Epilogue

Voilà le récit exact de cette belle journée. Autant dire qu'on en a pris plein les mirettes. Gageons que le Racing Club de Strasbourg en haut à droite de l'Hexagone a su, avec ce changement de paradigme radical d'identité visuelle et dénominative, poser les bases des succès à venir. Watch out le PSG, on arrive !

Co-réalisé par iuliu68 goeft zottel et jpdarky