Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Hosni soit qu'Ismaily pense

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Par takl
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Hosni, à droite

Depuis quelques jours une agitation sans précédent secoue le forum de racingstub.com, mettant en jeu des intérêts dépassant l'entendement et le simple cadre du football. La raison de ce désordre ? Hosni Abd Rabo.

1m72, 70 kilos. Ca paye pas de mine mais c'est suffisant pour constituer un sacré paquet de complications. C'est un euphémisme d'écrire que l'histoire d'Hosni Abd Rabo avec le Racing Club de Strasbourg n'aura jamais été simple. Un scénario qui tient autant du polar, du roman d'espionnage que des meilleurs mélodrames, le tout saupoudré de traités de droits internationaux et d'un peu de football.


Flashback

Qui eût cru, en cette fin de mois d'avril 2005, que les premières rumeurs concernant l'arrivée d'un jeune milieu de terrain égyptien marquaient en fait le début d'une saga comme seul le Racing sait nous en procurer? Dans l'euphorie de la victoire en Coupe de la Ligue, l'annonce de la possible venue de ce très grand espoir du football africain enthousiasme rapidement la majorité des gens, sentant la possibilité de réaliser un bon coup en enrôlant le joueur en provenance du club d' Ismaily. Les vidéos de ses buts dans le championnat égyptien achèvent de convaincre les sceptiques. De plus, les très actifs forumeurs égyptiens couvrent Hosni de louanges, on croit alors tenir la perle rare. Le jeune qui va tout claquer. Comme tous les ans. Sauf que ça va pas être si évident. Comme tous les ans.

Le 10 juin, Hosni atterri à Strasbourg et signe un contrat de quatre ans moyennant une somme avoisinant le million d'euros. Jusque là tout va bien. Les sourires sont de circonstances, les déclarations se veulent ambitieuses : « Je veux que toute l'Europe sache qui est Hosni. » dira le joueur à la signature de son contrat. On loue Marc Keller pour son flair de recruteur.
Reparti au pays des pharaons pour disputer un match en équipe nationale, il mettra pourtant près de deux mois à rejoindre son équipe.

C'est là qu' interviennent pour la première fois les Forces Suprêmes. Il convient d'expliquer au lecteur ce que sont les Forces Suprêmes pour que tout soit bien clair. Parce qu'après ça va se compliquer.
L'Egypte est un pays magnifique depuis la nuit des temps. Tellement qu'on y construisait même des pyramides pour aller tout en haut voir comment c'est magnifique. Napoléon lui même, en essayant d'envahir le pays daigna informer ses soldats des vertus panoramiques de ces monuments depuis quarante siècles d'histoire, c'est donc dire si c'était important. Seulement en Egypte, on fait pas tout comme tout le monde. On écrit en dessinant des animaux, on marche de profil et on fait trois ans de service militaire. L'armée est en effet un pilier du régime, et joue un rôle considérable dans la société civile. Le président Moubarrak et les arcanes de son administration en sont un autre. Réunies, ces deux entités donnent corps aux Forces Suprêmes, qui vont signaler une première fois leur force de nuisance par une rétention administrative d'Hosni Abd Rabo, qui ira jusqu'à menacer de faire capoter définitivement son transfert.

Hosni est en effet soumis à des obligations militaires, comme tout citoyen. On pense qu'ayant signé un contrat il bénéficierait aisément d'une dispense, or quand les Forces Suprèmes s'en mêlent rien n' est aisé. Le Ministère de la Défense du Caire ne daigne pas remettre le fameux document qui libérerait le joueur. L'Ambassade française est contactée pour faire avancer le dossier, on imagine les tracasseries, les renvois d'un bureau à l'autre, les bakchichs de rigueurs. On parle même d'une obligation pour le joueur de rester au pays jusqu'en 2007. C'est à cette occasion qu'on apprend que s'il avait été d'un club du Caire, cette question administrative n'aurait été qu'une formalité, mais qu'Ismaily sis sur les rives du canal de Suez n'a pas la même influence sur les membres du gouvernement.
Finalement, au début du mois d'Août, Hosni est exempté et atterrit à Strasbourg, mettant fin à un feuilleton estival aux multiples rebondissements. Une dernière coutume locale exigeant une rédaction du contrat en égyptien par un traducteur assermenté achève de donner un goût folklorique à cette histoire. Il n'est pas précisé si ces documents étaient exigibles sur papyrus ou sur tablettes d'argiles. Quoiqu'il soit ce dernier détail reporte ses débuts au 28 Août, mais à force, on n' était plus à la semaine près.


Premier départ

Une saison de cauchemar plus tard, le bilan est mitigé. Hosni, que Jacky Duguépéroux voyait comme « un grand joueur, un patron dans l'entrejeu » n'a pas tenu ses promesses. Cantonné la plupart du temps dans une position de milieu défensif, celui qui était venu pour remplacer Yacine Abdessadki aura trop peu souvent pu se montrer à son avantage. Expulsé dès son deuxième match pour un tacle idiot sur Rothen, il sera toute l'année à l'image de l'équipe, brillant en UEFA, mais incapable de faire la différence en championnat. Parti blessé à la CAN qu'il ne disputera finalement pas, le délai de son retour amène encore un peu d'eau au moulin de ceux qui commencent à être exaspérés des multiples délais engendrés par les aller-retours vers l'Egypte.

Dans la sinistrose d'une fin de saison ou la lutte âpre pour décrocher la lanterne rouge devait tourner à l'avantage de Metz, Hosni émet des velléités de départ, plaidant une mauvaise intégration. Dans un sursaut d'humeur, il déclare vouloir rester, avant de quand même être sûr de vouloir partir. C'est qu'en Egypte, ce que tu dis la veille n'est pas forcément la même chose qu'aujourd'hui, mais il n'est pas impossible que ça le soit demain. Question de culture sans doute..

Finalement, il se retrouve prêté à Ismaily, son club d'origine, sans qu'on sache vraiment s'il s'agit d'un prêt ou d'une vente, puisque sa cession annule une dernière indemnité de 300 000 euros due par le Racing, et prévoit une option de 500 000 euros supplémentaire payable au terme de l'exercice moyennant laquelle le joueur ré-appartiendrait au club de la corne de l'Afrique.
Hosni retrouve ses sensations sur ses terres et dispute une bonne saison, et attire les convoitises des plus grands clubs des bord du Nil, Zamalek et Al Ahly. Au mois d'avril dernier, on apprend que le club d'Ismailia n'est pas sûr de pouvoir disposer des 500 000 euros complémentaires. Le joueur pourrait rentrer en France, à moins que le club champion d'Afrique d'Ahly ne jette son dévolu sur lui, comme son agent le prétend. C'est ce qui marque les prémices d'un conflit qui pourrait bien changer la face du monde.


racingstub.com contre les Forces Suprêmes

C'est là que ça se complique. En effet, Al Ahly est le club phare du football égyptien, l'ogre qui dévore tout sur son passage, se rassasiant régulièrement de tous les titres qui traînent et accessoirement de la grande majorité des bons footballeurs du pays. A l'heure où sont écrites ces lignes, ce club n'est rien de moins que triple tenant consécutif du championnat, ayant remporté son 32ème titre cette année, 35 fois vainqueur de la coupe d'Egypte dont les deux dernières éditions. L'ossature de l'équipe nationale égyptienne est d'ailleurs toujours constituée par des joueurs de ce club, et c'est ainsi depuis la nuit des temps.
En quelque sorte un Olympique Lyonnais en mieux et qui marcherait depuis 100 ans. Mais à la différence de l'OL, Ahly est un club éminemment populaire, dans toutes les strates de la société puisqu'il représente l'opposition au régime. Alors que des clubs comme Zamalek ou Ismaily sont des clubs soutenus plus directement par les Forces Suprêmes, si l'on en croit nos amis Egyptiens qui viennent sur le forum nous donner des nouvelles.

Le 3 juillet, une dépêche annonce la signature de Hosni à Ahly, pour 500 000 euros versés comptant (et ça c'est le genre de choses qui rendent tout le monde content) plus 200 000 à verser plus tard (clause contractuelle visant à dérider les gens les plus exigeants, et à les rendre contents aussi).
Et là, c'est le drame.
Alors qu'on semblait se diriger vers une issue concrète, tout va se compliquer. Et prendre des proportions ahurissantes jamais vues auparavant. El fenomeno Haykel Gmamdia avait déchaîné les passions en son temps, mais jamais de là à mettre en jeu la stabilité politique de son propre pays, et encore moins de racingstub.com.

Le président d'Ismaily refuse en effet de reconnaître la légitimité du transfert, arguant qu'il a bien envoyé un chèque de 500 000 euros au Racing. Pendant ce temps, le joueur explique qu'il aurait préféré rester à Ismaïlya, mais que comme pour lui c'était passer à l'ennemi ou revenir en Alsace, il préférait encore la damnation éternelle et signer dans le club cairote. Et les Cairotes ça rend aimable parait-il.. Le président d'Ismaily Yehia Al-Koumi quant à lui n'en démord pas, et convoque la presse pour lui montrer le chèque en question. Côté Racing, Jean-Luc Herzog explique que l'option devait être levée au 15 juin : « Les termes du contrat étaient clairs et précis. Le paiement de 500 000 euros devait intervenir par virement bancaire sur le compte du Racing avant le 15 juin. Ça n'a pas été fait. Ensuite, il est vrai que nous avons reçu un chèque d'Ismaïly dix jours plus tard, le 25 pour être précis. Mais un chèque non certifié, ni un chèque de banque (...) »

Et l'affaire fait grand bruit en Egypte et même au delà. Alors que monsieur Al-Koumi refuse le certificat de transfert et menace de saisir la FIFA. L'ampleur digne d'une affaire d'Etat pourrait laisser croire que cette agitation est causée par un joueur au talent exceptionnel, l'équivalent égyptien d'un Zidane, sauf qu'en Egypte, ils en ont déjà un, de Zidane, sauf qu'il s'appelle Zidan, et que là c'est bien d'Hosni qu'il s'agit.
Les rumeurs les plus folles agitent le forum, la guerre des supporters fait rage, nourrissant un nouveau feuilleton de l'été, en anglais cette fois. Les approximations bien compréhensibles de certains en matière de football français, sans doute bien moins graves que notre quasi-méconnaissance du football égyptien, amènent à des passages truculents comme le message de wasef qui souhaite qu'Ismaily porte plainte contre racingstub.com devant la FIFA.
D'autres considèrent la venue d'Hosni à Ahly comme l'affaire de la dignité d'un peuple, s'insurgeant des liens ouvertement affichés entre Ismaily et le fils du président Moubarrak, symboles d'un régime corrompu. Le président Al-Koumi est insulté à la télévision par ses propres supporters, Hosni reçoit des menaces de mort, et tout le monde prend le stub à témoin pour plaider de la mauvaise foi de l'autre.



Entre les opposants aux Forces Suprêmes et les héritiers d'une ville bâtie sur le sang de ses ancêtres, notre position ne pourrait être autre que celle de modestes observateurs tendant à une neutralité la plus impartiale possible, tant par souci d'honnêteté intellectuelle que par prudence face à des forces qui nous dépassent. Au dernières nouvelles Hosni a signé pour trois ans à Ahly. Il ne reste plus qu'à attendre un jugement définitif des plus hautes instances du football mondial, ou l'envoi de casques bleus pour pacifier le championnat égyptien. Pendant ce temps on pourra toujours réviser notre anglais.


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takl

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